Venez faire une balade vigneronne en compagnie de Hélène et Christian dans le sud.
Partons à la rencontre de Hélène et Christian, accueillants du Domaine Pons Gralet dans les Pyrénées-Orientales. Pour ce portrait, nous avons choisi de cheminer ensemble sur la balade vigneronne que propose Hélène à ses visiteurs, une petite marche tranquille de 2h pour prendre le temps de découvrir leurs vignes et leurs oliviers, pour en savoir plus sur le terroir de la Vallée de l’Agly. Nous, nous découvrirons aussi au détour des paysages gorgés de soleil le parcours de ces deux fidèles d’Accueil Paysan dans les Pyrénées Orientales.
Si la balade vous plaît, vous pouvez retrouver Hélène et Christian sur leur domaine, pour une dégustation ou expérimenter la balade vigneronne à votre tour.
Départ de la petite boutique Pons-Gralet au cœur du village, sur la place qui honore par une statue son plus célèbre fils, François Arago, astronome, mathématicien, homme politique, républicain qui contribua à l’abolition de l’esclavage. Alexandre Dumas le décrit ainsi dans ses mémoires : « Il est impossible d’être plus pittoresque, plus grand, plus beau même, que ne l’est François Arago à la tribune, quand une véritable passion l’emporte, [...] qu’il attaque les violateurs de la charte royaliste ou défende la Constitution républicaine. [...] C’est qu’Arago est non seulement la science, mais encore la conscience ; non seulement le génie, mais encore la probité!» Arago, c’est un nom doublement connu à Estagel car son fils aîné Emmanuel obtint en 1872 pour les vins doux naturels, la production locale (Maury, Muscat,…) une loi favorable qui les distinguait des spiritueux.
Christian Gralet a hérité de son père les premières terres du Domaine. Jeune, il avait envie de voyager, de voir le monde. Après des études au lycée agricole de Rivesaltes, il a choisi de s’embarquer, dans la marine nationale, comme son frère qui lui avait donné l’exemple. Mais au bout de 5 ans, il est revenu âge de 22 ans à la terre pour rejoindre la propriété. Au début, il a aidé son père. Il a fait quelques petits boulots de taille et il est même parti quelques années travailler chez un propriétaire pour apprendre la vinification mais peu à peu il s’est rapproché d’autres vignerons (collectif de producteurs bio avec Alain Battle) qui, comme lui, souhaitaient s’affranchir de la cave coopérative, une des plus grosses de la région, créée en 1912.
La boutique place Arago
Nous sommes descendu jusqu’à la Grave, une rivière sèche qui traverse Estagel, sorte d’arroyo (rec en catalan) dont nous avons remonté le cours bordé de roseaux et de genêts jusqu’à prendre sur la gauche le long d’une petite parcelle de Macabeu, un des cépages utilisés pour les vins doux naturels, spécialités du terroir, qui est très vigoureux, et à tailler classiquement dans ce pays de vent et de soleil, c’est à dire en gobelet.
Il faut savoir que nous sommes ici, à Estagel, au cœur du « midi rouge », 1907 est dans toutes les mémoires. Jaurès est venu inaugurer la cave coopérative de Maraussan en 1905 , symbole de la coopération viticole «Tous pour chacun – Cave coopérative commune – Chacun pour tous »
Les pieds de macabeu
Nous montons le long d’un chemin bordés d’asperges sauvages, de romarin, d’oliviers, de pistachiers lentisques, de filaires à feuilles larges. Nous passons devant une vigne abandonnée et atteignons un bosquet regroupant 3 types de chênes, verts, pubescents et kermès. A droite, on remarque un talus de marne et de schistes noirs, c’est une veine qui vient de Maury pour s’arrêter à Calce.
La transmission du père de Christian à son fils s’est faite sans tension. Christian est passé en bio en 2001 misant sur la qualité du terroir et une production limitée, diversifiée et bien valorisée (vente directe). Christian est aussi un vigneron engagé (il a été porte-parole de la Conf’66,est une personne ressource pour Solidarité-Paysans 11-66) Le domaine s’est agrandi de quelques belles parcelles, notamment sur la route de Tautavel (8ha en tout aujourd’hui).
Le chemin qui serpente
Nous arrivons à un premier champs d’oliviers qui fait partie du domaine Pons-Gralet, puis un second puis un troisième de jeunes plants. Nous sommes sur des feches (terrasses en catalan) et au sommet de la colline nous avons un panorama ouvert sur la Tour de France à droite, la serre de Tautavel à gauche. Nous sommes à la frontière du royaume de Majorque et du royaume de France (traité de Corbeil 1258), terre reconquise par Mazarin (pour Louis XIV) par le traité des Pyrénées (1659). On peut voir également la célèbre « tour del FAR », tour médiévale à signaux qui permettait de surveiller la région et de communiquer avec les autres tours
A la retraite depuis peu, Christian a passé le relai à Galdric, le fils d’Hélène, et se consacre maintenant à ses 3ha d’oliviers.
Nous arrivons sur une belle parcelle de vigne du domaine, fraîchement travaillée, du grenache, « fier comme un espagnol » me confie Hélène, un autre cépage caractéristique des vins doux naturels dont le Domaine Pons-Gralet produits 4 variétés : le muscat ( dit de Noël), le Rivesaltes ambré, le Maury tuilé (5 ans d’âge minimum) et le Maury grenat, sans parler du Rivesaltes hors d’âge.
Hélène Pons a suivi un itinéraire qui n’a jamais été jamais bien loin de l’agriculture. Elle est la fille d’immigrés espagnols, a fait des études d’économie rurale à Perpignan jusqu’à un DEA tourné vers les pays en développement.
Elle fait un mémoire sur la forêt dans les Pyrénées-Orientales, rencontre des élus communistes et se retrouve agent de développement rural dans le Conflent. Pour avancer, elle passe des concours (IRA) pour rentrer au ministère de l’agriculture.
Vue d'une belle vigne de grenache sur fond de châteaux dits cathares.
Le paysage est somptueux : au loin les châteaux de Queribus et Peyrpertuse, châteaux dits cathares mais qui servaient en fait de postes de surveillance et de garnison de la frontière entre les royaumes de France et d’Aragon
Retour vers le village, non sans cueillir quelques asperges sauvages. On passe tout près de la chapelle St Vincent, reconstruite sur un socle pré-roman, qui propose alentours une aire de pique-nique et une pinède très appréciée des randonneurs.
Reçue, elle atterrit en Corse, à l’Institut Régional de Bastia où elle aura un poste d’Attaché d’Intendance dans l’éducation nationale. Elle passe à nouveau des concours pour être enseignante et le sera pendant 31 ans. Rencontre, entre temps, avec Christian Gralet, qui la fait se rapprocher du monde viticole et de la connaissance des vins. Elle termine sa carrière au rectorat autour des pédagogies innovantes, tout en aidant Christian à la commercialisation de sa production.
La chapelle Saint-Vincent et sa pinède
Une belle balade, mêlant lecture de paysage, découverte des cépages, de la flore méditerranéenne et de l’histoire catalane
Et maintenant que la balade est terminée, passons aux choses sérieuses : la dégustation des vins du Domaine Pons-Gralet, quel plaisir !
Hélène a amené le Domaine à se rapprocher d’Accueil Paysan - membre du CA de AP11-66 - elle propose à la boutique des produits paysans ainsi qu’une balade vigneronne 2 fois par semaine en saison touristique. Elle est depuis peu également au CA de Solidarité Paysans 11-66 et au CA de SP-Occitanie.
Et après l'effort, le réconfort !
Auteur de cet article...
Accueil Paysan est un réseau associatif, les adhérent·es se mobilisent pour écrire les articles de la rubrique actus. Ainsi, cet article a été rédigé par...
Stéphane Warot, adhérent de La Folie des Faourès à Quirbajou, dans l'Aude.
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